Ce que j’ai appris avec toi, mon fils

Ce soir, en couchant mon fils, après avoir râlé plusieurs fois sur lui car il était excité comme une puce, j’ai regardé sa petite tête de petit garçon de 6 ans qui fait parfois tellement plus que son âge, et j’ai pris conscience qu’il était encore un si petit enfant. Penchée au-dessus de lui et m’apprêtant à lui faire un bisou, je lui ai essuyé le front plein de sueur et je l’ai remercié d’être entré dans ma vie, d’avoir fait de moi une maman. Il m’a demandé pourquoi il avait fait de moi une maman.

« Parce qu’on devient maman quand on a un enfant, et tu es mon premier enfant ; c’est grâce à toi que je suis devenue une maman et que j’ai appris tellement de choses. Toutes mes premières fois en tant que maman, c’est avec toi que je les ai apprises et que je les apprends encore.

– Ah bon ? Et tu as appris quoi ?

– J’ai appris à consoler. J’ai appris à sécher des larmes. J’ai appris à rassurer.

– Comme quand j’ai peur devant des dessins animés, par exemple ?

– Oui, exactement.

– Et quoi d’autre ?

– J’ai appris qu’on avait parfois envie de s’énerver fort sur son enfant, mais que jamais, jamais on n’avait le droit de le taper ou de lui faire du mal.

– Pourquoi ?

– Parce qu’un enfant c’est petit, c’est faible, et ça serait injuste et inéquitable.

– Et tu as appris quoi d’autre ?

– J’ai appris à organiser des fêtes d’anniversaire, avec un gâteau au chocolat, des déguisements de pirate et des chasses au trésor.

– Comment tu as appris ça ?

– En regardant sur internet et en imaginant dans ma tête.

– Et quoi d’autre ?

– J’ai appris que le premier jour d’école était tellement important, pour un enfant, pour son maman et pour son papa.

– Ah bon ? Pourquoi ?

– Tu te souviens de ton premier jour d’école en petite section de maternelle ? »

Il lève ses yeux au ciel pour réfléchir, comme il fait toujours.

 » Oui, c’était avec maîtresse Martine.

– Voilà. Ce jour-là, tu t’accrochais à moi en pleurant, tu me suppliais de rester avec toi, et moi je ne voulais pas te laisser comme ça, tu me disais « Ne me laisse pas tout seul », et moi je te répondais « Mais tu n’es pas tout seul, il y a la maîtresse et plein d’autres enfants », et toi tu m’as répondu « Mais il n’y a pas papa, et pas maman, ne me laisses pas tout seul », et j’ai appris que pour toi ton papa et ta maman c’était ton monde, et que sans nous tu étais seul. Et Maîtresse Martine t’a arraché à ma jupe en me disant que c’était l’heure que les parents s’en aillent et moi je t’ai laissé et je pleurais et toi tu pleurais aussi. »

Je fais une pause.

Il me dit :  » On dirait que tu pleures.

– Oui, je pleure.

– Pourquoi ?

– Parce que je suis fatiguée et triste. J’ai tellement peur que vous soyez malheureux sans moi, ou sans papa, quand on sera séparés, j’ai tellement peur de vous faire de la peine. »

Il accueille mon explication.

 » Et tu apprends des choses avec Juliette ?

– Bien sûr que j’apprends des choses. On apprend tout le temps à être maman. Juliette est très différente de toi.

– Qu’est-ce que tu apprends, avec elle ?

– J’apprends à la comprendre, par exemple. Elle ne parle presque pas à 2 ans, alors que toi tu parlais très bien. C’est nouveau, pour moi.

– Moi, je la comprends. Quand elle dit « A I » c’est « mamie ».

– Oui, c’est vrai, tu la comprends bien, c’est ta sœur.

– Et elle aura aussi peur des dessins animés, comme moi ?

– Non, je ne pense pas. Vous êtes très différents tous les deux, et c’est très bien comme ça. »

Je marque une pause et lui caresse le front en souriant.

 » Allez, c’est l’heure de faire une bonne nuit.

– Non, dis-moi encore ce que tu as appris… Dis-moi ce que tu as appris avec Juliette.

– On en parlera demain, mon petit cœur d’amour. Bonne nuit. Je t’aime fort. »