Le jour où mon fils a eu 5 ans

reve.jpg

Mon fils,

Tu as 5 ans aujourd’hui.

Quand tu seras grand, tu seras astronaute, ou maître-remplaçant. Tu rêves de te promener dans un train à vapeur, au milieu des volcans en activité, pour aller visiter les pyramides d’Egypte en compagnie de Cristina Cordula, tu sais, celle qui apprend à s’habiller à la télé et que tu adores. Tu t’arrêterais bien au Japon après un détour par l’Afrique pour faire un safari et voir les animaux sauvages. En même temps, ça serait chouette si tu pouvais voir un château en vrai : ceux des princes et des princesses. D’ailleurs, tu te demande si les princes et les princesses existent encore ; ou si, comme les dinosaures, ils ont disparu. L’idéal serait même de visiter un château en compagnie d’un pompier et d’un policier. Pourquoi ne pas finir cette balade par la visite du Futuroscope puis de sauter dans un avion faire le tour du monde ?

La liste de tes envies se complète au gré de ce que tu entends et de ce que tu vois. « Maman, tu notes sur ton téléphone que j’aimerais faire ça ? » Je note, je note, mon fils aux écoutilles grandes ouvertes.

Tu trouves qu’il y a deux choses inutiles : dormir, et l’école.

Dormir, car tu as du mal à arrêter ton cerveau. Tu te relèves le soir, sans bruit, pour t’occuper ; le matin, nous découvrons ta lumière allumée, et des bouts de papier colorés coupés, une paire de ciseaux et des feutres par terre ; ou bien des livres, étalés partout sur ton lit. Et tu as bien du mal à te lever.

L’école, car tu trouves cela inutile : tu aimes apprendre de nouvelles choses, et tu n’y apprends rien. Tu veux « jouer » ; pour toi, « jouer » c’est « apprendre ». A l’école, tu ne fais rien de tel. « Mais moi je veux écrire en attaché, mais je suis chez les moyens, et les moyens ils écrivent en lettres bâton, et c’est la maîtresse qui décide car c’est la maîtresse l’adulte. » Tu te fonds dans la masse, tu t’adaptes, tu t’oublies, tu n’oses rien demander. Par exemple, la maîtresse a bien vu que tu ne dormais plus, à la sieste de l’école. Elle t’a proposé de ne plus aller au dortoir ; tu as refusé, car les moyens doivent aller au dortoir, c’est dans l’ordre des choses.

L’ordre des choses : tu aimes l’ordre, oui. Le seul moment où ta chambre est en désordre c’est quand des amis viennent à la maison. Tu as mis du temps à accepter qu’ils touchent à tes affaires mais tu arrives à t’y faire. C’est comme ça, un enfant, ça bouge et ça remue. Ca n’écoute pas un CD de musique pendant deux heures, ça ne joue pas au Dobble adulte, ça ne s’amuse pas à compter jusqu’à 200 pour le plaisir ou à parler en anglais. Enfin, certains, pas tous.

Mais tout cela n’est pas le plus important. Tu n’as que 5 ans, c’est tout petit, et tu ne veux pas qu’on l’oublie. Tu veux qu’on s’occupe de toi comme on s’occupe de ta petite sœur, alors tu gémis, tu tires la langue, tu fais le bébé, tu chouines, tu veux qu’on te porte comme un nourrisson quand tu sors du bain. Tu ris comme des étoiles qui tombent du ciel, avec ta petite voix si jolie. Tu chantes des heures durant en voiture. Tu dors avec ton doudou, « doudou blanc » ou « doudou normal » comme tu l’appelles ; tu es persuadé qu’il a mal s’il tombe alors tu le consoles. Tu fais des grimaces quand on te prend en photo et tu veux regarder des Tro-Tro et des Oui-Oui. Tu dessines des maisons avec plus de fenêtres que de pièces, des cœurs multicolores, des girafes orange, des princesses aux couronnes surdimensionnées. Tu vis dans un monde où un vieil homme barbu distribue des cadeaux aux enfants à noël et où des cloches font tomber des chocolats dans le jardin.

C’est ça, ton monde.

Joyeux anniversaire, mon petit, tout petit garçon.

 


8 réflexions sur “Le jour où mon fils a eu 5 ans

Laisser un commentaire